Peintre, lithographe et photographe suisse, Albert Lugardon est né à Rome en 1827, au sein d’une famille d’artistes : son père, Jean-Léonard Lugardon (1801–1884), était un peintre d’histoire renommé, formé à Paris dans l’atelier de Gros et ami d’Ary Scheffer. Très jeune, Albert s’installe à Genève avec sa famille, où il reçoit sa première formation artistique auprès de son père.
Il poursuit ensuite ses études à Paris, à l’École des Beaux-Arts, où l’enseignement d’Ary Scheffer exerce une influence décisive sur son style. Dès le milieu du XIXᵉ siècle, Lugardon se distingue par ses paysages alpins d’un réalisme poétique et par ses scènes animalières. Son œuvre Pâturage lui vaut une distinction au Salon de 1855, confirmant son talent de peintre du paysage de montagne.
Artiste attentif à la nature, il s’attache à traduire la majesté des Alpes suisses et la lumière changeante des hautes altitudes. Sa palette claire, son sens de la composition et la précision de son dessin reflètent une observation rigoureuse du réel, tempérée par une sensibilité romantique héritée de la génération précédente.
Passionné par les innovations techniques de son temps, Albert Lugardon s’intéresse très tôt à la photographie. Il mène des recherches sur la photographie instantanée et le mouvement, et reçoit en 1881 une médaille de la Société photographique de Londres pour ses expérimentations. Cet usage de la photographie comme outil préparatoire à la peinture suscite pourtant des débats parmi ses contemporains, certains artistes jugeant la pratique contraire à la tradition du dessin d’après nature.
Outre sa carrière d’artiste, Lugardon joue un rôle actif dans la vie culturelle genevoise. Il siège au comité de la Société des amis des beaux-arts et à la Commission des beaux-arts de Genève, contribuant à la promotion des artistes suisses et à la diffusion de la peinture de paysage.
Ses œuvres sont présentées dans plusieurs expositions majeures, notamment aux Expositions universelles de Paris, et rencontrent un accueil favorable auprès du public et de la critique. À la fin de sa vie, fidèle à un esprit généreux, il organise la vente posthume de ses œuvres et de celles de son père au profit de l’Hôpital cantonal de Genève.
Albert Lugardon s’éteint en 1909. Son œuvre, marquée par la précision du regard et une profonde harmonie entre l’homme et la nature, incarne une des expressions les plus sensibles du paysage alpin au XIXᵉ siècle.